samedi 1 mai 2010

Trust me, I'm a doctor


STEVEN MOFFAT - DOCTOR WHO

Bientôt cinquante ans que le Docteur officie et il ne fait que rajeunir. Le Doctor Who c'est le mélange écossais improbable entre Benny Hill et Star Wars, entre Retour vers le futur et les Monty Pythons. Quiconque s'est déjà intéressé de près ou de loin à la science-fiction à la télévision a déjà entendu parler du Docteur. Coup de bol aujourd'hui : le Docteur fait peau neuve et c'est l'occasion parfaite pour découvrir qui il est.

A l'heure qu'il est vous n'avez raté que quatre épisodes de la saison 5, celle qui nous intéresse surtout aujourd'hui. Nouveau docteur, nouvelle assistante, nouvelle team créative. Tout ce que vous avez besoin de savoir c'est qu'il s'agit d'un E.T. rigolard dernier de sa race qui voyage à travers le temps et l'univers dans une cabine téléphonique bleue. Donc soit il sauve le monde soit il se balade. Après Russell T. Davies qui, en 2005, remettait le Docteur au goût du goût (et faisait de David Tennant, le dixième docteur, l'un des hommes qui portent le mieux le costume au monde) c'est au tour de Steven Moffat, scénariste d'abord, producteur exécutif ensuite, de prendre les rennes du Docteur et de son univers brinqueballant. Bonne nouvelle : Steven Moffat a tout compris à l'aspect cheap et casse-gueule de l'entreprise et s'en amuse en surproduisant tous les codes du genre.

C'est drôle, indomptable, plein de petits vieux anglais et de petites voitures anglaises, ça s'est amélioré en tous termes : réalisation, storytelling, c'est même un tout petit moins cheap qu'avant. Cela le reste, heureusement d'ailleurs. Matt Smith est un très bon docteur et son introduction est délicieuse : il renaît, essaie de savoir qui il est, et demande à une petite fille qui vit seule de lui cuisiner plein de plats différents pour qu'il puisse réapprendre ce qu'il aime. Ça a toujours été amusant et décalé mais là ça devient véritablement excitant. Ça devient enfin ce que ça a toujours eu vocation d'être : un cache-cache géant parmi les millénaires et les étoiles. Et en plus sa sidekick de l'année est craquante bien que rousse.

Il faut sauter sur l'occasion sans réfléchir. Avec un tel background (plus vieux que Star Wars) Doctor Who s'apprivoise toujours sur le tard. Vous apprendrez qu'il a des arch-nemesis, les Dalek, les extra-terrestres les plus mal bricolés du monde, qu'il a quelques amis qu'il rencontre au détour de certaines aventures, qu'il a un passé trouble depuis toujours et que personne n'en sait bien plus sur lui que jadis. Tout ça on s'en fiche mais vous l'apprendrez quand même. La structure même de la série repose sur des épisodes self-contained en vase clos, pas besoin de savoir quoi que ce soit sur l'univers, juste être légèrement familier avec les personnages. Le Docteur est toujours accompagné d'une belle pépée, quoi de plus logique ? Le Docteur s'interdit souvent d'aimer mais ça ne l'empêche pas de flirter. Très vite, avec lui, vous rencontrerez Winston Churchill, des anges belliqueux, de vieux anglais souvent, vous traverserez l'histoire de l'humanité sans même vous en apercevoir.

Car la spécificité même du concept réside ici : le Docteur pousse les limites du voyage dans le temps jusqu'à leurs paroxysmes. Le Docteur a deux règles : voyager dans des lieux extraordinaires et ne jamais interférer avec le cours du temps. Souvent, ses voyages se présenteront de manière un peu chaotique, un peu impromptue. Parfois, on découvrira que malgré lui le Docteur est responsable de l'éruption du Vésuve et donc de la catastrophe de Pompéi. Parfois le Docteur rencontrera sa femme alors qu'il ne sait pas qui elle est. Ou encore parfois il se retrouvera à devoir sauver l'univers d'une race extraterrestre très moche dans un coin de l'univers tellement flou qu'on navigue entre extrême futur et extrême passé. C'est là tout le secret de la série : le Docteur, à travers sa cabine téléphonique bleue, a toutes les possibilités. Il voyagera sans s'inquiéter de son point d'arrivée. Il naviguera tellement loin qu'on ne se posera même plus la question de savoir dans quelle époque nous nous trouvons. Et le revers de la médaille est cruel : le Docteur rencontrera parfois des personnes qu'il ne connaît pas encore mais qui elles le connaissent. Comme cette femme qui dit avoir partagé son amour dans son passé à elle mais sûrement dans son futur à lui. De ce fait, impossible de savoir tirer le vrai et le faux de cette romance trouée en son milieu, de cet amour inter-époques où les personnages n'aimeront qu'un fantôme lointain de la personne qui se trouve en face d'eux. Souvenir d'un être aimé déjà oublié, re-rencontre et redécouverte des qualités qui nous ont toujours amené à croiser nos chemins : les montagnes russes du voyage dans le temps tentent de faire écran mais souvent on ne pourra s'empêcher de remarquer qu'en sauvant le monde le Docteur a l'esprit ailleurs. Et le souvenir d'une personne qu'il n'a pas encore chéri l'amènera à toujours voyager, encore plus loin, avec la conviction profonde que quelque part quelqu'un l'attend pour l'aimer.

2 commentaires:

Axel Cadieux a dit…

Cette série a l'air cool. Malheureusement j'ai décidé de ne plus regarder les séries déjà "commencées". Je fais de bons choix, mais je manque de temps.
Dans Land of the Lost, sur la planète hors du temps, il y a une petite cabine téléphonique rouge. Je te dis que ce truc est loin d'être si mauvais.

Hugues Derolez a dit…

Oui je peux te comprendre mais justement non, mon texte veut te prouver le contraire. Tu ne peux pas commencer le Dr Who, ça a déjà 50 ans et des centaines d'épisodes. Tu es obligé d'apprendre sur le tard avec cette série. Et ce n'est pas bien grave, ça s'apprécie comme un apéritif, comme un X-Files malin que tu regarderais le soir avant de t'endormir en souriant. Quand c'est bien hein, sauf que parfois c'est aussi très con raté et ennuyeux. Sauf depuis cette nouvelle saison, très puissante dramatiquement parlant et qui s'enfonce au plus profond du concept. Je dis ça, ça ne m'embête pas que tu considères avoir autre chose à faire de ton temps mais je ne te pouvais pas laisser dire ça alors que j'essaie justement d'expliquer ici que le Dr Who s'improvise et s'apprivoise avec le temps.

Et pour Land of the Lost je te crois à coup sûr. A l'époque j'avais très envie de le voir (souviens toi dans le métro newyorkais). Le seul problème c'est que je n'ai trouvé aucun texte qui puisse confirmer mon envie. Que des trucs mollassons et merdiques. Alors je m'étais fait une raison.