jeudi 8 octobre 2009

Lost 5.16 & 5.17 récapitulation



* Ou comment mettre en lumière l'ensemble de la série en une seule séquence : l'ouverture. On en a souvent vu des premières scènes tapageuses , des débuts prometteurs : Desmond dans la Swan Station, la mère de Locke qui se maquille avant de se faire écraser par une voiture, etc. Et pourtant ici, en un gros épisode musclé, on rencontre et apprécie Jacob. On le voit évoluer du XIXème siècle (amenant le Black Rock jusqu'à lui) et 150 ans plus tard, mourir sous les coups de poignard de Ben. Et un petit espoir naît enfin : Lost a aussi beaucoup de talent pour conclure ses histoires. L'accumulation de cliffhangers et de twists qui sont devenus la matière-même de la série nous a habitué à ne plus exiger quelque chose de définitif ; au mieux quelques portes ouvertes au moment d'un rebondissement superbe. Et pourtant ce seasonfinale, malgré le fait qu'il souffre de quelques défauts, nous amène vers quelque chose d'inattendu et de particulièrement excitant : un conflit entre demi-dieux, les géants de l'île, prémisse probable au jugement définitif de l'humanité. Après une saison très orientée science-fiction on ne peut qu'être choqué de voir à quel point la conclusion de cette dernière évolue dans les sphères du mysticisme (et même du mythologique) et ce de manière totalement décontractée. Comme si cela allait de soi. On commence à se dire que oui, c'est possible : peut-être que Lost réussira sa sortie.

* La guerre, le conflit, cela fait un petit moment qu'on nous rabat les oreilles avec cette idée. Maintenant nous voilà les deux pieds dedans. Le libre-arbitre (symbolisé par Jacob ?) contre le chaos, l'esprit de corruption, celui qui profite de la faiblesse des hommes (son Némésis tout de noir vêtu ?). La position du bien contre le mal serait, je l'espère, bien trop caricaturale. Pourtant cela reste envisageable ne serait-ce que pour le public qui a besoin de s'accrocher à des positions claires et bien définies (même si ce type de public a dû fuir Lost depuis bien longtemps. Il y reviendra peut-être). Il est donc question d'un combat, d'un jeu, et de règles qui l'encadre. Nous allons d'abord aborder les flashbacks, ou le chemin de Jacob à travers la jeune histoire des passagers du vol 815, pour s'intéresser ensuite aux événements de 1977 et pour terminer par ceux de 2007. Et en chemin on s'intéressera à ce conflit qui semble plus que jamais la nouvelle colonne vertébrale de Lost.

* Jacob rencontre donc un grand nombre de Losties (ceux qui ont survécus jusque là, en gros) à travers le temps. Tout comme Richard Alpert il ne prend jamais une ride. Alpert révèlera également que c'est Jacob qui l'a fait être de cette façon. On peut donc supposer que les pouvoirs de Jacob sont juste immenses et que chaque acte un tant soit peu fantastique intervenant dans la série est la résultante de son bon vouloir. Les visions données à Desmond saison 3 ? Le voyage des Losties dans le temps ? Tout ça fait probablement partie d'un entraînement, d'une grande préparation en vue du sprint final : quel camp choisiront-ils (sciemment) ? feront-ils preuve de bonté ou seront-ils aigris ? Jacob intervient sans jamais vraiment intervenir semblerait-il. Ils rencontrent ces personnages et les désignent, ils les touchent, comme pour les bénir. Il met un point d'honneur à ne pas les influencer dans leurs choix et à leur laisser tout leur libre-arbitre. Il n'interviendra réellement qu'auprès d'Hurley (qui semble en avoir besoin) en lui affirmant qu'il n'est ni fou ni maudit : bien au contraire. Peut-être que dans ce grand affrontement où Jacob, en paternel bienveillant qui dit que l'homme sera un jour capable d'acte d'amour désintéressé, et où l'Anti-Jacob promeut la corruption, affirme que les hommes ne sont capables que de s'auto-détruire et se battre (c'est quand même l'histoire des 5 saisons de Lost) Hurley sera une clé non-négligeable. En effet il est l'un des seuls personnages qui n'ait rien à se reprocher et qui soit capable d'une honnête bonté. Et un seul exemple pourrait suffire à mettre fin au conflit. Jacob rencontre également Locke (il le réveille, le ressuscite presque, après l'accident qui le paralysa) ou encore Sayid (et semble entraîner plus ou moins la mort de Nadiya). Il va donc à la rencontre de certains Oceanic 06 après leur retour. Comme s'il était important qu'ils reviennent pour une dernière épreuve.

* En 1977 ça pulse. L'incident survient et tout le monde se tire dessus. Les raisons invoquées enfoncent encore un peu plus loin tous les personnages dans le pathétique le plus gras : ils prennent leurs décisions de destruction/préservation de l'île (et donc de beaucoup d'innocents) en se référant aux volutes de leurs vies amoureuses. Jacob : 0, Anti-Jacob : 1. Petite digression brève : l'Anti-Jacob (joué par Titus Welliver) est appelé Samuel dans les castingcall (les noms utilisés dans ceux ci sont en général inexacts pour mettre les fans sur de mauvaises pistes). Le frère (véritable, mais on peut penser à une conception de frère-ennemi dans Lost) de Jacob dans la bible est Esau (et le dernier fils de Jacob est Benjamin si je ne me trompe pas). Pour des raisons de coolitude et de prononciation je nommerai donc ce personnage Samuel pour la suite du texte. M'est avis qu'un nom tout autre lui sera attribué d'ici le début de la saison 6.

* En 1977 rien n'a changé. Le bras de Pierre Chang est écrasé (il avait une prothèse dans certaines vidéos d'Orientation), Radzinsky survit pour ensuite s'enfermer dans la Swan Station et s'y suicider, la bombe n'explose pas, etc. Il n'y a qu'au dernier instant, l'instant du cliffhanger final, qu'on peut se demander si quelque chose a changé. Mon opinion ne change pas : tout ce qui s'est passé c'est toujours passé de cette façon. Je pense que Jughead va se mettre en marche et exploser ce qui constituera (et a toujours constitué) le fameux Incident. Juliet, étant celle qui déclenche l'explosion, n'y survivra pas. On peut remarquer que Juliet a un flashback dans cet épisode et que celui-ci est le seul où Jacob n'apparaît pas, où elle n'est pas "touchée" et donc probablement pas sauvée. Je pense que c'est cet instant que Jacob "choisira" ("They're coming") pour les faire revenir dans le présent. Sayid est mal en point mais il peut survivre. Miles n'a pas été touché par Jacob mais peut-être que ce dernier a rencontré d'autres personnages dans des flashbacks qui nous sont encore inconnus.

* La seconde possibilité voudrait que la bombe explose et que tout le monde meurt. Ainsi le vol 815 se poserait en douceur (dans une sorte de "réalité parallèle") à LAX le 22 Septembre 2004. Et on repartirait de zéro. Cela semble hautement improbable et aurait de quoi mettre en rogne beaucoup de fans. Ce cliffhanger est donc en lui-même assez vain (et sent l'entourloupe à plein nez) surtout qu'il semblait tout tracé depuis l'apparition de Jughead pour la première fois en début de saison (en 1954). La bombe "explose", l'écran final apparaît en noir bordé de blanc (au contraire de son habitude). En fait cela a le goût du plus grand cliffhanger du monde, celui de pouvoir annuler toute une série et tout recommencer de zéro. C'est en fait (au contraire du "We have to go back" de Jack fin saison 3) juste trop gros pour réussir à nous avoir. Mais tout comme Sayid qui tire sur le jeune Ben plus tôt dans la saison c'est l'acte lui-même, l'image et ce qu'elle implique/provoque qui est à apprécier et à cajoler. On commence à savoir depuis ces quelques années de Lost que tous ses cliffhangers n'ont pas forcément un sens. Parfois ils sont oubliés, parfois, tels de vrais Deus Ex Machina, ils relancent la mécanique narrative, parfois encore ils servent de leurres. Pour des raisons évidentes d'organisation je ne vois pas la série repartir de zéro. Cruellement déceptive mais tout de même intriguante comme "idée finale" que cette explosion et l'annulation pure et simple de 3 ans de vie. Jack pourrait invoquer tous les morts survenues sur cette île, ceux dont on ne connaît pas le nom (les redshirts), Charlie (sacrifié pour rien ou pas grand chose au mieux, voir pour apporter le chaos au pire), Boone, Mister Eko, etc. Ce serait une raison suffisante pour changer le cours du destin. Pourtant ce cours semble inflexible. On sait que tous ces gens sont morts pour une certaine raison, pour le "plus grand bien", quelque chose qui interviendra sûrement d'ici la fin de la série. Au lieu d'invoquer ce que la raison nous susurrerait Jack préfère expliquer son dégoût, son ras-le-bol, sa déception amoureuse. Et nous, en tant que spectateurs, ne pouvons nous empêcher de nous mettre à leurs côtés. Tant d'années d'ardeur, de mystères bâtis sur pas grand chose, de bêtise, de mensonges, de fatigue : allez-y faîtes la sauter bon sang cette putain d'île qu'on puisse tout oublier. Et oui. Un instant de faiblesse, un vrai geste de suicide totalement irrationnel. Malgré son côté très programmatique dont je parlais plus haut l'intervention de Jughead aura permis ce ressort tout à fait nouveau et pourtant tout à fait sensé. Après tant de marasme si le repos ne peut se trouver que dans la mort proposons le à tout un chacun, sans même lui demander son avis, et capitulons.

* Rose, Bernard (et Vincent) font figure de ceux qui ont saisis l'essentiel dans ce chaos. De loin la scène la plus cool de l'épisode et cette misérable Kate qui, tout dans l'urgence, crie à qui veut l'entendre qu'il faut empêcher Jack de faire exploser une bombe à hydrogène (et qui prendrait presque Rose & Bernard de haut au vu de leur immobilisme) n'a jamais semblé aussi pathétique. Juliet aimerait rester mais elle fait partie d'un flot d'événements qu'elle ne maîtrise plus et l'amènera littéralement au fond du trou. Rose & Bernard sont à la retraite mais ils ont surtout compris les bienfaits de l'île. Jacob pourrait être furieux en voyant ses "élus" et fier de Rose & Bernard : il s'est démené pour eux et aucun n'a en tête de le remercier. Leurs vies étaient de vrais trous à rats puants avant leur arrivée. Depuis ils ont connus l'aventure mais aussi le bon temps, l'amitié et l'amour parfois, les miracles, le paradis, l'Eden en quelque sorte. Et les voilà encore occupés à essayer de se trouver des raisons pour se tirer dans les pattes. Les auteurs n'oublient pas le principal et nous le livre en une seule scène certes un peu simpliste mais aussi simplement splendide : tant qu'à être ici, autant vivre côte à côte, partager nos petits repas, et profiter de ces joies simples. Jamais Lost n'a été aussi mature.

* La Statue et le mystère qui l'entoure semble désormais résolu. Il y a encore certaines dissensions parmi l'effort collectif des fans (c'est quand même fascinant, plus que les débats stériles "Whatever happened happened / le passé peut être changé", ce jeu de pistes gigantesque sur lequel chacun travaille et tous, des millions, dans la même direction !) entre, surtout, Tahweret et Sobek. Tahweret est une sorte de gros hippopotame mignon (entre autre déesse de la fécondité, ce qui expliquerait le problème de la naissance sur l'île depuis que la statue se serait écroulée ; écroulement dû à la détonation de Jughead ?). Sobek est une divinité un peu plus mineure qui semblerait être affiliée à la pluie et aux inondations parfois ou encore à la réparation des dégâts. Une allégorie de Jacob ? On en termine, à mon sens, définitivement avec l'histoire de la statue à quatre orteils et pourtant on ne nous assène aucune vérité définitive. Voilà qui est agréable. Il est sûrement plus important de se demander qui (ou quoi) la statue représente. Jacob ? et le Smoke Monster serait Samuel ? (tout comme on le voit dans une peinture murale dans la caverne sous le temple, là où Ben se fait juger). Petit détail qui a quand même un goût de confirmation : Sobek a une tête de crocodile et les crocodiles n'ont que 4 orteils. Ça semble stupide comme phrase mais ça expliquerait cette histoire d'orteil manquant et semble donc la théorie la plus probable. "Well it's a wonderful foot Richard, but what does it have to do with Jacob?" : mouahahahah. Et dire que Jacob a vécu là depuis tout ce temps. Quel coquin.

* En 2007 on marche longtemps pour aller à la rencontre de Jacob. Au niveau des détails Caesar est bel et bien mort (il semblerait que tous les personnages qui soient apparus post-saison 2, exception faite de Ben & Desmond, ne soient en fait là que pour mourir dans des circonstances étonnantes et donc créer du buzz). Ilana & Bram sont sympathiques et probablement du côté des Autres, d'Alpert, de Jacob. Ils parlent de candidats. Candidat à la succession de Ben donc ? Ou même nouvel hôte pour l'esprit de Jacob ? A la question "What lies in the shadow of the statue?" Richard répond donc (en latin) : Celui qui nous sauvera tous. Ou quelque chose d'approchant. Donc sûrement Jacob.

* Comme la saison dernière Locke est dans une boîte. Même plan, même mouvement de caméra mais intensité décuplée par mille. Incroyable. Locke en ultime méchant, quel twist. La saison dernière j'étais très peu enthousiaste face à ce cliffhanger faiblard, cette révélation molle qui avait des airs d'inachevée. Ok, l'un des personnages principaux était mort mais avec la structure toute en ellipses, en spirale en quelque sorte, de la série on se doutait bien qu'on le reverrait très régulièrement. Là, on ne peut qu'être choqué : Dead is dead, et tout les signes allaient dans cette direction (regardez les épisodes depuis le "retour" de Locke, le 7ème, est vous verrez qu'entre sa démarche et son lexique on ne le reconnaît tout simplement plus). C'est surtout l'incroyable cruauté des circonstances de sa mort (et donc de sa vie sur l'île) qui nous retourne. Locke n'aura jamais été qu'un pion. Pire : son visage sera usurpé et choisi par "l'ennemi" pour tuer ce vers quoi Locke a toujours marché (Jacob). Ben parlera des sacrifices qu'il a dû faire (au nom de quoi ?) mais le Locke original aurait pu en dire tout autant. Jacob sait vraiment pousser ses ouailles dans leurs derniers retranchements. Il espère toujours que malgré ça quelqu'un sera assez courageux et lucide pour continuer à subir le courroux de l'île et à courber l'échine (ce qui est quand même le plus gros message chrétien pur qu'on trouvera dans Lost et sûrement dans l'ensemble du paysage audio-visuel, un message totalement décontextualisé, presque terroriste en 2009, celui de l'acte de foi, d'accepter quelque chose de plus grand entrer dans sa vie). En 1977 Jack répète "l'avertissement" déjà prononcé par Locke puis par Sawyer : le leader est en chemin et son nom est John Locke. "If I were you, I wouldn't give up on John Locke". Comment peut-on prendre cette phrase ? Nouveau coup d'épée dans l'eau, incroyable et improbable leurre qui ne fera qu'amener Locke à son destin de "leader" puis à sa mort et ainsi à se faire "habiter" par le malin ? Oui et non. Terry O'Quinn (qui n'en sait pas plus que nous à ce stade de la série) dit lui-même que Lost en a terminé avec l'ancien personnage de John Locke. Mais qu'il continuera à garder ses traits pour incarner celui qui est fort probablement Samuel. Les scénaristes sont en vacances et nous donneront sûrement des informations au compte-goutte d'ici Janvier prochain. Peut-on prendre cette réplique de Jack pour argent comptant, comme petite douceur censée rassurer les fans du John Locke de la première heure (et dieu sait qu'il y en a) ? Jacob meurt à la fin de cet épisode mais on a beaucoup de mal à croire qu'il ne soit pas une sorte d'entité immortelle. Alors qui sait. Peut-être que le corps du "premier" John Locke sera finalement l'hôte d'une force supérieure, ou peut-être même que Jacob le ressuscitera pour s'opposer à Samuel. On aurait donc un conflit Locke vs Locke tout à fait cheap visuellement parlant mais juste extraordinaire en termes de jeu d'acteur. On ne sait jamais, bien évidemment, surtout dans le territoire de Lost mais j'ai tout de même la forte impression que John Locke n'était qu'un pion de plus, qu'il n'a jamais été spécial, et qu'on ne le reverra jamais vraiment.

* Entre le choix de sauver Benjamin Linus puis celui d'ériger John Locke en tant que leader je tiens quand même à faire remarquer que Richard Alpert a beau être un beau gosse il est tout de même un conseiller relativement à chier.

* On retrouve la cabane de Jacob (probablement pour la dernière fois). Ilana semble le chercher et nous apprend qu'elle a été squattée par quelqu'un d'autre (à savoir Samuel apparaissant dans le corps de Christian Shephard) et pour une fois je peux dire : je le savais. Développons donc nos informations : Jacob a probablement habité cette cabane il y a fort longtemps. Il a ensuite sûrement déménagé parce qu'embêté par un voisin un peu tapageur (Samuel). Samuel a été probablement emprisonné (par les Autres) dans cette cabane par une sorte de rituel, d'acte magique, à savoir une traînée de cendres. Dans l'épisode 3.20 The Man Behind the Curtain Ben amène Locke à Jacob et tente un sublime coup de bluff : parler à une chaise vide en faisant croire à Locke qu'il n'est pas assez spécial pour voir Jacob. Je pense que Ben a choisi cette cabane presqu'au hasard sans savoir ce qui y résidait exactement. A savoir Samuel. Qui apparu et prononça à Locke ses mots "Help me". Il l'aura effectivement bien aidé par la suite. C'est à partir de cet épisode que les apparitions de morts se succèderont. On peut imaginer que Ben & Locke n'ont pas fait attention à là où ils mettaient les pieds (littéralement) et ont donc "brisé" le cercle qui gardait Samuel emprisonné. Dans le 4.01 The Beginning of the End Hurley voit cette cabane délogée de son espace et y observe Christian ainsi qu'un autre personnage (ou plus exactement son œil). Il s'enfuit et rompt peut-être définitivement le cercle rituel. Et depuis Samuel est libre de prendre l'apparence de personnes décédées sur l'île (Christian, en disant parler au nom de Jacob, Claire ?). Peut-être que chaque mort apparu sur l'île est en fait l'œuvre de Samuel essayant de manipuler les vivants à ses propres fins (assassiner Jacob, puis probablement autre chose d'au moins aussi cataclysmique). Maintenant que Locke est revenu en chair et en os (mais décédé) et que Samuel sait probablement que Richard l'attend avec impatience il ne suffit plus qu'à se faire passer pour un John Locke récemment ressuscité pour impressionner les foules et se frayer donc un chemin vers Jacob. Le plan aura été de longue haleine (le plus long Long Con de l'histoire de la série ?) mais aura fini par payer.

* La scène finale (Ben & le faux Locke & Jacob dans le pied géant, ahah, voilà qui est bien improbable comme phrase) est juste remarquable. Jacob : 0, Samuel : 2. La dimension tout simplement biblique de la chose est unique à la télévision. Quand on voit la série à ses débuts on a le droit d'être en pleine exaltation. Ne pas avoir peur de jouer avec les codes de la mythologie (le fil du destin tissé par Jacob, par exemple), toujours les évoquer doucement sans jamais prononcer leurs noms, voilà une façon d'étendre un récit tout à fait admirable. On entre depuis un petit moment dans le territoire de la véritable tragédie ; les dieux en coulisses qui torturent les humains. Lost retombe sur ses pattes comme ça. Comme à chaque fin de saison nous sommes censés apercevoir ce dont la prochaine saison sera faite. Et c'est la première fois que cette "ouverture" m'excite autant. "They're coming" dit Jacob avant de s'éteindre (ou de brûler c'est au choix) et le faux Locke (Samuel donc) semble irrité. S'agit-il d'une nouvelle force qui va prendre place ? des Losties coincés en '77 que Jacob va faire revenir au temps présent comme dernier acte avant sa mort ? La dernière tirade Ben vaut un Emmy à elle toute seule (j'ai l'impression de dire ça régulièrement mais tant pis) et Jacob lance au nez et à la barbe de Ben ce qui semble être l'ultime gifle, l'insulte suprême qui remet en cause tout le parcours de Benjamin Linus : "What about you?". Bah oui, toi, et alors ? Qu'est-ce que je peux bien en avoir à faire d'un cloporte menteur et égoïste comme toi ? C'est assez couillu comme réplique face à un homme qui vous menace d'un couteau. Ce qui m'amène à penser que Jacob avait un plan derrière la tête et qu'il voulait peut-être être tué. Pourquoi ? C'est nébuleux. Peut-être pour renaître sous de meilleures auspices.

* Dieu est mort. L'avenir n'a jamais semblé aussi incertain.

* Grand absent de ce final : Desmond Hume. En a-t-on fini avec son personnage ? Sera-t-il l'un de seuls à s'en sortir et à connaître le bonheur ? Malgré le message de début de saison qui nous le présentait comme (divinement) spécial ? Est-il un "candidat" ? Je pourrais très bien accepter de ne plus le revoir (malgré ce que Miss Hawking disait : l'île n'en a pas fini avec toi). Il faut aussi savoir qu'Henry Ian Cusick (aka Desmond) est poursuivi depuis très peu de temps pour harcèlement sexuel auprès d'une scripte ou d'une technicienne de cet ordre sur le plateau de Lost. Elle fut aussitôt renvoyée et le poisson un peu noyé. Démêlées avec la justice et présence au générique de Lost n'ont jamais fait bon ménage.

* Le conflit Jacob/Samuel n'est qu'un jeu. On aura souvent entendu cette comparaison (Desmond dernièrement qui disait qu'ils n'étaient tous que des pions sur un échiquier trop grand pour en voir les contours). On sait désormais pourquoi les Losties sont là : ils n'ont pas été forcés mais ont été amenés malgré tout, touchés. A l'aulne de cet épisode on peut revoir toute la série et trouver une justification acceptable : Jacob wants it that way. Amener toutes les pièces au bon endroit. "It only ends once, everything before that, it's just progress". Le classieux conflit entre Widmore & Ben qui faisait tant chavirer les esprits la saison dernière semble bien à l'étroit désormais. On peut donc se demander comment vont se constituer les équipes la saison prochaine. Widmore, type un peu rude mais au fond assez sympa, va-t-il tenir avec cette enflure de représentation maligne qu'est Samuel ? Où Ben va-t-il finalement se placer ? L'identité du faux Locke va être mis à jour dès sa sortie du pied de Sobek. Certains le suivront, d'autres pas. Même si tout cela prend des airs d'un combat du Bien contre le Mal (c'est nécessaire, comme je le disais précédemment, en gros pour capter l'attention des cons, pour qu'ils finissent un peu par sortir la tête de l'eau et avoir enfin une récompense pour 5 ans de visionnage et donc de bons et loyaux services) je pense que Samuel va proposer quelque chose de légèrement plus ambigu que ça pour la suite des événements. Ainsi certains le suivront, d'autres le combattront. Les Losties eux-mêmes seront probablement "décimés" entre ces deux camps et s'opposeront. Jusqu'à l'ultime affrontement et à ce qu'un "camp" l'emporte sur l'autre de par ses arguments : oui l'homme est corrompu de par sa nature et ne mérite pas beaucoup d'attention OU non, un homme sur million est véritablement capable d'acte de charité, de partage, d'amour en somme. Et cet homme vaut donc toutes les peines du monde. On croit depuis longtemps au happy end (relatif) de la série mais ce serait tout de même assez dément si Samuel finissait par l'emporter, que Jacob avoue son erreur et que l'humanité soit ensuite anéantie &/ou abandonnée, laissée à elle-même par les dieux. Wow. Quelle fin douce-amère.

* Tout ceci, depuis le début, ne serait qu'une succession d'épreuves arbitraires pour les Losties ? Pour qu'ils comprennent qu'il ne sert à rien de lutter ? Les 12 travaux d'Hercule en somme mais sans même qu'on soit prévenu de notre participation à un jeu. Voilà l'intérêt de beaucoup de fans relancé je pense et c'est le véritable tour de force de ce seasonfinale. Nous voilà aux portes de la conclusion. Le chemin le plus difficile s'annonce. Il va falloir tenter le sans faute, accepter de laisser quelques personnes sur le côté pour s'avancer vers une conclusion claire, cohérente et satisfaisante pour les masses, les millions de fans qui n'en demandent pas moins. Lost a toujours su tirer son épingle du jeu par son brassage intense : de la sf et du new-age et du drame avec de l'humour et aussi de l'aventure entouré de relations amoureuses pour s'avancer vers le mysticisme et etc. On en a, d'après les dires (qu'on peut croire une fois sur deux environ) de Cuse & Lindelof, terminé avec la sf et le voyage dans le temps. Ç'aura été une belle aventure mais très difficile à digérer. Très appréciable mais qui ne me manquera pas. La seule chose qu'on peut véritablement espérer c'est que Lost, pour son sprint final, garde son aspect compil et fourre-tout (à la manière de Sissi l'impératrice ou encore de Star Trek) et permette à tout un chacun de s'y retrouver. Une série qui début sur l'image d'un crash d'avion pour se terminer en affrontement entre dieux, oui, on peut se dire qu'il y a vraiment quelque chose d'incroyable qui a été accompli. Mais n'oublions pas l'humilité l'humour et la désinvolture intrinsèque à la série depuis son commencement. N'oublions pas que Lost n'a toujours été que de la sueur, des ballades en forêt et des coups de poings échangés avec respect et virilité ; que ce sont donc les racines de la série. Que tout le monde s'entretue sous les drapeaux fièrement levés de Samuel & Jacob, pourquoi pas. Mais qu'on n'oublie pas qu'il est avant tout question d'hommes, pas de divinités, d'hommes faillibles avec leurs fêlures, d'hommes qui se débattent et qui doutent. Et qu'entre le point A du 22 Septembre 2004 et le point B qui se situera approximativement en Mai 2010 le véritable héros aura été l'île et son aventure : on aura tous trimés, le plaisir aura été là. Et n'oublions pas l'enseignement de Rose Bernard & Vincent. Cette île nous tous, du monde entier, nous aura rapprochés.

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