mardi 16 septembre 2008

Phase 1 ?


MAXIS - SPORE

Et bien non. Pas du tout.



Will Wright, créateur de la série à succès The Sims, récidive avec Spore. Là où les Sims permettait à tous les fans sans morale de realtv crasseuse de perpétrer les fantasmes les plus inavouables et d'y prendre beaucoup de plaisir Spore applique la même logique en l'étendant à la phylogenèse de toute une espèce. De sa naissance à sa mort. Avec entre eux les rebondissements joyeux et sublimes qu'on serait en mesure d'attendre. Pas d'exposition de caractéristiques qu'on voudrait intrinsèques à nos espèces (sur leur humeur, leur tempérance, leurs conditions générales, leur ligne de vie, leur hygiène, leurs croyances...), pas de déviance « à la Sims » qui nous permettrait de se faire tripoter la corne dorsale brunâtre à deux frères et sœurs d'une même espèce.

Depuis 20 ans déjà avec Populous, et avec certains essais plutôt attachants (Black & White de Peter Molyneux ou dans une moindre mesure Creatures, le simulateur d'intelligence artificielle) les développeurs de jeux vidéos croient pouvoir nous blouser en nous proposant de devenir Dieu. Avec plus ou moins de possibilité d'action et sur une échelle de succès elle aussi très variable. Will Wright nous promet un jeu incroyable depuis plusieurs années. Et son œuvre d'art ludique et révolutionnaire tombe bien vite à plat comme tout mauvais coup de bluff. Le jeu s'adresse à tous et ratisse terriblement large. On retiendra un incroyable éditeur de créatures qui permet à peu près toutes les fantaisies (dans la limite du respectable, toujours) et semble même capable de réaliser mon projet le plus dantesque : fabriquer des êtres humains (on peut aussi fabriquer des hommes-bananes). Après ça on assiste à un succession plus ou moins agaçante (parfois horripilante) et plus ou moins convenue de casual games. On deviendra une cellule et on croquera quelques pousses dans le grand bouillon originel (pendant une demi-heure). On incarnera ensuite une population d'un individu, trois, cinq, dix, cent, des millions ? Le gameplay est peaufiné pour être le plus simpliste possible. Tout est compréhensible dans le seconde, tout se fait rapidement. On construit quelques bêtes véhicules, on récolte une ressource, on conquiert villes puis planètes. Jamais la conquête spatiale n'a paru aussi ennuyeuse.

On se demande quelle place prendra le nouveau jeu de Maxis dans une société américaine parfois peu portée sur l'évolution et ses possibilités. En aucun cas le produit ne pourra être taxé d'inspiration Créationniste ou même d'encourager n'importe quelle idéologie. Son résultat est probablement pire. Ce jeu galvaude l'évolution. Destiné à une clientèle qui s'approchera finalement plus des 8 ans que des 18 la simplicité avec laquelle on passe du statut de cellule à celui d'empire galactique en déconcertera plus d'un. Depuis Black & White précédemment mentionné la communauté de joueurs (celle qui joue depuis qu'elle est en âge de marcher et qui a vu grandir l'industrie en question) ne cesse de relancer la question : A quand la phase un ? A quand le premier simulateur de vie complet, celui qui nous fera nous sentir réellement au dessus de tout, contrôlant les destins, ayant droit de vie et de mort, capable de tout gérer ; jusqu'à en ressentir une sorte de grisement, une certaine forme de sensibilité qui nous pousserait à devenir des créateurs bienveillants ? Spore n'est pas raté, il n'entre tout simplement pas dans cette case. Spore permettra à des parents américains middle-class de s'apercevoir d'ici six mois que leur fils de quatorze ans triture de gigantesques hommes-phallus toute la journée. Il construira des cabanes, des tours puis des avions en se disant que quand même, c'est vachement simple d'administrer l'univers. En entendant ça n'importe quel dieu serait en droit de perdre le moral.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ah merde mec. Je pensais que ce jeu serais génial

Hugues Derolez a dit…

Evolve my ass. Le côté goûteux (que réclame les vendus de Jeuxvideo.com par exemple) qui consisterait à s'émerveiller de voir sa petite bestiole aller des mers de notre planète jusqu'aux contrées inexplorées du cosmos tombe, désolé je me répète, totalement à plat. On s'émerveille pas, on conspue. Il n'y a aucune impression de vie. Les phases sont trop brutalement séparées, c'est complètement désarticulé tout ça. Nos petites merdes grandissent mais au final on n'en verra jamais plus d'une dizaine à l'œuvre. Et pour terminer le jeu on se promènera dans une soucoupe volante grotesque en quête de nouvelles espèces à étudier. Donc aucune sensation d'avoir créer une civilisation solide.